Depuis quelques années, la population d’abeilles est en très forte diminution, avec une disparition totale sur certaines zones. Ce phénomène porte le nom de «Syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles » ou CCD (Colony Collapse Disorder) : subitement, les ruches se vident de leurs abeilles sans que l’on ne retrouve aucun cadavre à proximité. Ce syndrome est très préoccupant en raison de l’importance écologique de l’abeille en tant que pollinisatrice.
Les études en cours montrent que plusieurs causes sont responsables de cette disparition progressive : traitements pesticides, infections parasitaires, maladies, pollution, réduction de la ressource alimentaire (quantité et diversité des fleurs fournissant nectar et pollen) et des habitats, compétition avec des espèces invasives, changement climatique, multiplication des émissions électromagnétiques, nouveaux prédateurs…
Des pesticides peuvent perturber l’orientation des abeilles et ainsi altérer le développement des ruches. En utilisant une nouvelle technique de puces fixées sur des abeilles permettant de suivre précisément leurs déplacements, des chercheurs français de l’INRA et de l’Institut des techniques agricoles ont ainsi démontré une action indirecte des pesticides qui, même utilisés à dose non mortelle, provoquent la mort de nombreuses abeilles.
Les populations d’abeilles sont en déclin dans le monde entier. En plus des pesticides déjà incriminés dans leur disparition, des chercheurs néerlandais viennent de mettre en évidence que la baisse de la biodiversité était un facteur important dans le dépérissement des populations d’abeilles.
La pollinisation : le rôle crucial des abeilles
D’après de récentes estimations, 87,5 % des plantes à fleurs, qu’elles soient cultivées ou sauvages, sont pollinisées par les animaux (Ollerton et al, 2011). Ce chiffre souligne le rôle crucial joué par les abeilles, l’un des principaux pollinisateurs, pour le maintien de la production alimentaire et des écosystèmes de plantes sauvages. En effet, la pollinisation animale permet d’augmenter la production de fruits et de graines dans 75 % des principales cultures alimentaires mondiales (Klein et al, 2007). En outre, d’après l’étude la plus récente menée sur le sujet, la valeur des cultures dépendant de la pollinisation serait d’environ 265 milliards de dollars (Lautenbach et al, 2012). À l’évidence, comme tout autre service écosystémique, si la pollinisation venait à disparaître, sa valeur serait alors inestimable. «L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que sur la centaine d’espèces de plantes qui fournissent 90 % de l’alimentation mondiale, 71 dépendent de la pollinisation des abeilles. Rien qu’en Europe, 84 % des 264 espèces de cultures dépendent de la pollinisation animale et 4 000 variétés de légumes ne pourraient exister sans les abeilles.
En Bretagne
Comparativement à certaines autres régions françaises, la Bretagne possède un nombre important d’apiculteurs (4800) et de ruches (54400), réparties de façon globalement homogène sur l’ensemble du territoire régional. Par contre, le taux de professionnalisation est très faible (1,5 %). Cependant, ici comme ailleurs il est important de veiller à la bonne santé des abeilles bretonnes.
Le Conseil Scientifique de l’Environnement de Bretagne a étudié un certain nombre de mesures pour mieux lutter contre les surmortalités d’abeilles domestiques en Bretagne. Parmi lesquelles :
– Développer un réseau de surveillance pour avoir un diagnostic précis des mortalités d’abeilles domestiques en Bretagne et enrichir le diagnostic national.
– Renforcer la collecte des données de base sur les mortalités et les troubles des abeilles.
– Réduire les facteurs de surmortalité.
– Définir une stratégie de protection sanitaire des abeilles, en particulier pour la lutte contre le varroa.
– Encourager la diversité génétique des reines.
Inciter à des pratiques agricoles plus respectueuses des abeilles ou permettant de minimiser les risques.
‐ Poursuivre le dialogue agriculteurs ‐ apiculteurs sur les bonnes pratiques phytosanitaires. Encourager la sensibilisation des agriculteurs aux effets potentiels des différents pesticides (seuls ou en synergie) afin que les conseils d’utilisation soient respectés.
‐ Cas des insecticides systémiques : dans le plan Ecophyto 2018, les insecticides systémiques en enrobage de semences ne sont pas pris en compte dans les objectifs de diminution des volumes de pesticides utilisés. Par conséquent, leur usage se maintient, voire se développe, car ils sont préconisés en remplacement des insecticides « classiques ». Cette situation paraît incompatible avec la volonté d’encourager de « bonnes pratiques agricoles » vis‐à‐vis des abeilles.
‐ Diminuer l’usage de pesticides sur les bords de champs et de route.
‐ Implanter des couverts végétaux favorables aux pollinisateurs (moutarde, navette, radis noir, vesce, trèfle, phacélie, …) sur les bandes enherbées.
‐ Favoriser la diversité des fleurs (fleurs sauvages et fleurs semées de la liste ci‐dessus) sur les bords de route, les bords de champs et les espaces agricoles délaissés. Lors de la création de nouvelles haies, encourager l’implantation d’essences locales d’arbres et d’arbustes en incluant des essences intéressantes pour les abeilles comme le châtaigner, le houx ou le troène.
Une initiative intéressante en Bretagne : Gwenan, le parrainage des ruches
En développant l’implantation des ruchers grâce à un parrainage, Gwenan entend multiplier la présence des abeilles, agir sur leur préservation et ainsi encourager leur impact environnemental. Gwenan a installé son premier rucher à la réserve naturelle Paule Lapicque, l’un des sites de Bretagne Vivante. Située entre Paimpol et la pointe de l’Arcouest, dans la commune de Ploubazlanec, la réserve naturelle Paule Lapicque offre un cadre exceptionnel et une vue superbe sur la baie de Launay. Installées au milieu d’un verger, les abeilles y trouvent un cadre propice, riche et varié pour leur activité de pollinisation. Le partenariat avec l’association Bretagne Vivante favorisera l’organisation d’animations et d’événements autour de l’abeille et de la préservation de l’environnement. Déjà, une dizaine d’autres lieux remarquables ont été identifiés pour le développement de nouveaux ruchers sur le territoire. La réserve naturelle Paule Lapicque est une première étape avant un déploiement sur toute la Bretagne. Le parrainage s’adresse à la fois aux particuliers et aux entreprises. En échange, visites, animations, pots de miels, bonbons… Pour en savoir plus : Gwenan.bzh
Sources : Sciences de la vie et de la terre, le web pégagogique, Greenpeace.org, Le Conseil Scientifique de l’Environnement de Bretagne